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22 juin 2009 1 22 /06 /juin /2009 16:14

 

Être de Gauche aujourd’hui, être Socialiste en 2009, cela suppose de reprendre l’initiative et de penser le Monde dans lequel nous vivons pour ne pas être contraints de subir le cours logique des choses et les solutions imposées par nos adversaires comme une fatalité insurmontable. Plus que jamais, nous devons incarner la résistance au fatalisme et au « à quoi bon » sans pour autant nous replier dans un passéisme nostalgique et romantique car, trop souvent attaché à d’anciens schémas d’analyse. La critique conduit nombre de protestataires à se recroqueviller sur des modalités de défense efficaces dans le passé mais désormais largement inadaptées aux nouvelles formes du capitalisme redéployé.

 

Dès lors, notre organisation doit changer afin d’assurer sa crédibilité et sa pérennité. Pourtant, ne nous y trompons pas : la solution ne viendra pas d’une hypothétique « prise de conscience collective » que pourrait entraîner l’effondrement des empires financiers et qui encouragerait soudainement l’adhésion. Indéniablement, le capitalisme financier d’inspiration néolibérale continue à prospérer tandis que notre société et notre planète se dégradent ;

 

L’accumulation du capital entre les mains de quelques uns et l’exigence constante de profit s’accompagnent encore et toujours d’une augmentation croissante des inégalités et de la précarité. La crise n’est donc pas simplement celle du capitalisme financier mais bien celle de la critique du capitalisme, préalable nécessaire à l’élaboration d’un projet politique fondé sur un nouveau modèle de développement et un nouveau modèle de société. Elle présente à chacun la division radicale des choix possibles d’existence, une politique et éthique ancienne mais toujours décisive : quelle société est-il bon de promouvoir ? Quelle vie est-il bon de mener ?

 

Définir un nouveau modèle de développement fondé sur l’Europe

 

Une fois de plus, après ces élections désastreuses pour le Parti Socialiste Européen, l’Europe se trouve être dans une impasse. Pourtant, le MJS ne doit pas renoncer à faire de l’Europe une priorité. La séquence nous en donne les moyens si nous savons nous en saisir en apportant la preuve que l’Europe peut être utile et efficace dans ses moments de crise. Mais notre discours se doit d’être clair : si demain notre levier d’action sera encore et toujours la puissance publique sous la forme de l’État-providence (réformé de manière à devenir préventif) et les collectivités locales (réorganisées de manière à garantir leurs actions), l’échelon qui deviendra le plus pertinent sera l’Europe. Sachons expliquer que l’État-providence est affaibli parce qu’il ne se situe plus au niveau territorial pertinent (le capital est désormais mobile et peut échapper à la régulation nationale en se délocalisant). Sachons démontrer que pour mettre fin à la dérive spéculative des marchés financiers, le territoire de la régulation politique doit rattraper celui de l’économie (la mondialisation de la régulation doit suivre celle du capitalisme). Si jusqu’à une période récente, l’essentiel des efforts de l’Europe s’est concentré sur la mise en place de l’Union économique et monétaire, il nous faut maintenant élargir la perspective de sa construction sous peine de la réduire à un marché et de la diluer dans la mondialisation. Car nous en sommes tous intimement convaincus, l’Europe est bien plus qu’un marché : elle a su inventer une méthode pour construire des médiations entre la nation et le monde et elle est porteuse d’un modèle de société différent, ouvert et fondé sur un idéal de justice sociale et de respect de la personne humaine.

Dès lors, le MJS doit avant tout mettre son énergie dans la construction d’une Europe politique! En effet, lorsqu’elle sait ce qu’elle veut, l’Union européenne est encore à même d’infléchir le cours du monde, alors que pris individuellement, les États qui la composent sont désormais hors d’état de le faire (la réponse à la crise financière est à ce titre un échec en termes de coordination). Notre défi est donc le suivant : réussir à convaincre que l’Union européenne est une construction sans équivalent dans le monde proposant un modèle de développement unique.

 

Pour renforcer la construction européenne et lui redonner un avenir, nous proposons :

 

-          De défendre une politique sociale et fiscale plus juste

 

L’Europe sociale, priorité de tous les socialistes, doit passer par une protection sociale forte en instaurant : un revenu minimum européen au pro rata du coût de la vie de chaque États-membres, la rédaction d’un code du travail européen, la création d’une sécurité sociale professionnelle, la création d’un fond européen de soutien aux salariés victimes des restructurations. Et à terme parvenir à une harmonisation fiscale. En effet la fiscalité est l’un des grands absent de l’édifice européen. Pour nous, un tel manque revient à condamner l’Europe à n’être qu’un grand marché, incapable de répondre aux attentes des citoyens en termes de justice et de sécurité sociale. L’ouverture des frontières et la mobilité accrue du capital ont rendu caduque l’autonomie de nos politiques fiscales et les ont rendues interdépendantes. Il s’agit dès lors de choisir une organisation commune de la fiscalité afin de maintenir une pression fiscale homogène.

 

-          De construire une politique budgétaire plus ambitieuse

 

L’Europe sociale ne sera possible qu’avec une augmentation substantielle du budget européen. L’Union doit se doter de la possibilité d’emprunter et d’un impôt européen sur les sociétés. En l’absence d’un gouvernement économique, nous devons institutionnaliser l’Eurogroupe afin de créer un pilotage macro-économique de la zone euro : la réunion des ministres des finances de la zone euro doit avoir les pleines compétences juridiques pour arrêter la politique économique de la zone euro et y élire un président stable, qui sera le ministre des finances de l’Europe.

 

-          De réorienter la politique économique pour plus d’efficacité

 

Nous proposons de réviser les statuts de la Banque centrale européenne (BCE). Du fait de son attention trop exclusive à la stabilité des prix, la politique monétaire de la BCE est un frein à la croissance. Certes, la prise en compte de l’objectif de croissance et d’emploi pourrait se faire à statuts inchangés, avec d’autres banquiers centraux. Toutefois ce serait un signe politique fort. Il ne s’agit pas de revenir sur l’indépendance de la banque centrale, systématique dans toutes les grandes démocraties. Ce qu’il faut, c’est tout simplement un alignement sur les statuts qui existent dans les autres pays occidentaux et qui ont fait la preuve de leur efficacité. Pour s’opposer à la spéculation par l’investissement, la Banque européenne d’investissement (BEI) doit faire du crédit d’investissements dans d’importants projets d’infrastructures ou en faveur des PMI/PME innovantes. Selon ses statuts, la BEI, dont les capitaux sont souscrits par les États, peut prêter à hauteur de 250 % ses capitaux propres qui atteignent actuellement, près de 165 milliards d’euros.

 

Proposer un nouveau modèle de société fondé sur l’émancipation de la personne

 

Trois décennies de gouvernement néolibéral nous livrent une leçon : le redéploiement du capitalisme s’est accompagné d’une transformation de l’homme, de ses pratiques, de ses mœurs et de ses relations sociales. La diffusion générale des techniques de l’évaluation individuelle et quantitative, l’essor des méthodes de « développement personnel », l’omniprésence du marketing dans les rapports humains, la promotion du sport de compétition comme modèle de rapport à soi, la soumission de la politique à la logique du management, la mise en concurrence généralisée des individus, l’expansion d’un individualisme négatif, etc. : ces dispositifs font systèmes et tendent à imposer une  forme d’existence et de réalisation de soi. D’autre part, l’accumulation du capital est devenue le principe du fonctionnement individuel comme s’il fallait que l’existence soit indexée à la vie de la finance, comme si chaque individu devait se regarder comme un « entrepreneur de soi », comme si la réalisation de soi était censée s’éprouver dans le dépassement de toute limite et dans l’assouvissement instinctif de chacune de ses pulsions. Le néolibéralisme impose un modèle anthropologique avec lequel nous souhaitons rompre : celui de l’homo oeconomicus, l’acteur rationnel, calculateur et maximisateur dont la réalisation passerait par la performance (le « travailler plus, pour gagner plus » en est un exemple), la jouissance immédiate et la consommation. La conséquence de ce modèle est une société fragmentée où les inégalités sociales sont de plus en plus fortes, creusées par des différences aussi bien économiques que sociales.

 

Or si autrefois l’école républicaine était au cœur de la lutte pour l’égalité des chances, elle repose aujourd’hui sur un principe dévoyé : celui de l’égal accès de chacun aux biens scolaires (formation, heures de cours, professeurs), sans prise en compte aucune, des situations sociales particulières dont chaque enfant est l’objet. La carte scolaire dans les villes ghettoïsées finit par renforcer la ségrégation territoriale, les filières scolaires déformées par les représentations reproduisent les barrières sociales, les filières universitaires concentrent l’essentiel des moyens sur les étudiants les plus favorisés, quant aux grandes écoles, elles disposent de quatre fois plus de moyens par étudiants que les universités. Le résultat est le suivant : la durée des études est très inégalitaire. Un jeune issu d’un milieu aisé bénéficie de 23 à 25 années de formation gratuite. Un jeune issu d’un milieu défavorisé sorti sans qualification n’aura bénéficié que de 13 années.

 

Fidèles à nos convictions concernant l’émancipation de la personne humaine, nous devons donc à tout prix repenser notre modèle de société à partir d’une conception de l’éducation et de la formation qui soit nouvelle et ambitieuse. Cela passera par exemple par :

 

-          Le développement de filières professionnelles longues

 

L’idée est de réserver pour les bacheliers professionnels au moins la moitié des places dans les formations supérieures technologiques ou professionnelles. Le principe est clair : tout élève qui débute en CAP ou le cas échéant, en BEP rénové et qui passe son bac professionnel doit pouvoir aller jusqu’au diplôme d’ingénieur.

 

-          Investissement prioritaire dès le plus jeune âge

 

Maintien des RASED, multiplication des effectifs, aménagement des rythmes, c'est l'ensemble de la politique éducative qui doit être revue.

Pour lutter contre la mise en concurrence des écoles entre elles et des élèves par conséquent, la carte scolaire doit être refondée en tenant compte de la répartition sociale et territoriale. Sa suppression conduirait à la création d'écoles de seconde zone.

Les zones classées prioritaires doivent bénéficier de moyens matériels et humains renforcés et adaptés aux spécificités de chaque zone.

La lutte contre l'échec doit devenir l'objectif central des politiques publiques éducatives par un accompagnement individualisé, une réorganisation des temps d'enseignement et la formation des maitres.

Une véritable réflexion nationale est à mener sur l'accueil et la prise en charge des tout petits sans se rejeter la responsabilité du financement mais en apportant pour chaque âge une offre d'accueil et de développement adaptée.

 

Replacer notre action collective dans l’Histoire

 

La situation difficile actuelle du socialisme doit amener le MJS à comprendre et à expliquer le monde dans lequel nous vivons en commençant par formuler un diagnostic critique de la période historique dont nous sommes les héritiers. Nous devons envisager collectivement une redéfinition de notre modèle d’intervention publique ainsi qu’une relance de l’action politique entendue dans le sens d’une mise en forme et d’une mise oeuvre d’un projet collectif quant à la façon de vivre-ensemble.

 

En l’espace de 30 ans, le sens de l’histoire a profondément changé et c’est bien un monde nouveau dans lequel nous vivons aujourd’hui, un monde qui n’a plus qu’un rapport lointain avec celui dans lequel nos ainés ont pu vivre jusque dans les années 70. La mondialisation (ouverture des marchés, circulation des capitaux, révolutions scientifiques tels que les NTIC et les bio et nanotechnologie) ainsi que de nombreux événements (chute du mur de Berlin, attentats du 11 septembre 2001, 2ème guerre du Golf, nouvelle offensive terrestre d’Israël en Palestine) ont bouleversé l’ensemble de nos relations à l’espace, au temps et au vivant et ont ouvert une nouvelle période historique à laquelle il est impossible de nous soustraire. Par ailleurs, dans ce paysage instable, en constante mutation, nous devons affronter aujourd’hui une crise globale et multiple (financière, boursière, monétaire, économique, énergétique, alimentaire, écologique, sociale et immobilière) qui trouve son origine dans l’échec d’un système, le capitaliste financier orienté par l’idéologie néolibérale.

 

C’est au regard de ce monde nouveau qu’il nous faut créer un projet politique pour la France et pour l’Europe tout en restant fidèles aux valeurs qui fondent le socle commun des socialistes : la justice sociale, l’émancipation de la personne humaine, l’économie et la finance au service de l’homme et de la planète. Notre priorité doit être à l'évidence la clarté de nos objectifs et de notre stratégie. Plus que jamais, les socialistes doivent s'interroger sur ce qu'ils veulent et le définir sur le fond. Par ailleurs, soyons convaincus qu'il n'y aura d'alliances possibles pour les prochains combats, et parmi nous de réconciliation éventuelle entre les différents courants, qu'en fonction d'une redéfinition de notre méthode qui pourrait être le réformisme radical de Gauche. Il s’agit moins de pousser le curseur du projet politique « plus à gauche » que de pousser le curseur de la volonté politique « plus intense ». Nous devons donc marquer le retour du volontarisme politique en apportant la preuve que le réformisme n’est pas condamné à un accompagnement du libéralisme économique et que la mondialisation ne marque en rien la fin de notre action politique mais au contraire, une nouvelle étape du socialisme.

 

Mais nos intentions n’auront de sens que si nous avons le courage d’ouvrir un large débat en prenant enfin en compte les analyses issues de la société civile, citoyens, intellectuels et experts qui depuis des années tentent de nous alerter sur la voie à suivre pour aborder avec lucidité les nouveaux défis qui se présentent à nous. Pour cela, nous devons enfin prendre acte du fait que la mécanique de l’engagement semble aujourd’hui plus complexe qu’hier. D'abord l’engagement n’est plus exclusif, les citoyens ne s’engagent pas moins mais leurs engagements se superposent dans le temps avec une intensité variable ; de plus, ils s’engagent désormais avec un regard critique sur les modes de militantisme « traditionnels » dans les partis ou les organisations syndicales, étant davantage informés ; enfin, cet engagement se fait plus facilement à un moment et sur un sujet précis correspondant à leurs sensibilités, préoccupations et attentes individuelles.

 

D’autre part, l’organisation politique n’est plus l’unique voie royale de l’engagement mais devient l’aboutissement reconnu d’un faisceau d’engagements multiples dont il est le  dépositaire. De ce fait, notre organisation oscille constamment entre deux visions, soit l’imposition d’un primat du politique sur la société civile soit l’occupation d’une place centrale dans le dialogue entre la politique et la société civile. La vision des liens que nous souhaitons tisser avec elle semble à ce titre dépassée. S’il est vrai que nous sommes aujourd’hui fonctionnellement sous équipés pour avoir des points d’ancrages dans toutes les organisations qui sont les relais des engagements, la seule double appartenance parti/syndicat, statutaire ne peut pourtant plus être le viatique unique de nos liens avec la « société civile » tant les lieux d’expression des revendications sociales et sociétales se sont multipliées.

 

Plus que jamais, lorsque nous sommes dans l'opposition, il y des lieux d'expression de la conflictualité à inventer. D’ailleurs, il n’est pas nécessaire que les discussions s’engagent à partir d’un consensus préalable ; bien au contraire, nous devons assumer la conflictualité lorsqu’elle se présente et ce afin de construire des lieux où les échanges se font de manière continue. Bien sûr, nous n’avons pas vocation à donner à toutes un contenu politique car il est évident que ces revendications ne se nourrissent et ne nourrissent pas toutes le corpus des valeurs socialistes. Toutefois il arrive qu’elles nous interpellent directement ou bien sont un relais simple pour ce que nous portons. Le plus souvent, elles sont l’expression d’acteurs de terrain, mieux placés que certains responsables politiques notamment pour nous informer et formuler les problèmes avec plus de rigueur et d’expérience concernant certaines situations sociales précises.

 

Dès lors, les questions qui doivent orienter nos pratiques politiques sont les suivantes : Qui sont les mieux placés dans la société pour à la fois nous informer mais aussi agir et nous aider à répondre efficacement aux problèmes qui la traversent ? Comment susciter l'adhésion du citoyen aux principes et aux valeurs si chers à la gauche ? Comment conjuguer exemplarité, engament éthique sur le terrain et refonte du logiciel ? C'est ce à quoi doit tenter de répondre le MJS dans le temps politique difficile que nous traversons si un jour nous souhaitons l'alternance du pouvoir.

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5 février 2009 4 05 /02 /février /2009 22:50

Que cache l’avalanche des réformes ou des projets de loi relatifs à l’éducation publique, défendus corps et âme par Nicolas Sarkozy et menés au pas de charge par Xavier Darcos, ministre de l’Éducation Nationale, et par Valérie Pécresse, ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche ?

·     Une volonté assumée de voir disparaître les moyens humains, horaires et financiers indispensables à la réussite de tous.

 

·     Une idéologie tenace fondée sur le désengagement de l’État, la privatisation de notre rapport à l’éducation et la remise en cause du service public au profit du privé.

 

Autant de mesures qui organisent une concurrence généralisée entre les élèves, qui perpétuent les discriminations et les inégalités sociales et culturelles, et qui n’apportent aucune solution aux problèmes de l’échec scolaire et de l’insertion professionnelle.

La droite semble avoir oubliée que les jeunes visées par ses choix n’ont pas hésité à descendre à deux reprises dans la rue (contre le CPE en mars 2006 ; contre la loi LRU en novembre 2007) dans le but d’exprimer leurs craintes à l’égard de l’avenir qu’elle leur réserve et afin de manifester leurs inquiétudes concernant la précarité dans laquelle elle les installe.

Force est de constater que les solutions qu’elle a prise pour réformer les lycées et les universités ne tiennent pas suffisamment compte de ces messages. Elle échoue donc indéniablement à trouver les solutions satisfaisantes pour répondre à une nouvelle question sociale propre aux jeunes qui s'est durablement installée au sein de la société française.

Notre projet pour l’école, l’université et la formation doit donc occuper un rôle central durant l’année à venir. L’ambition de cette contribution est d’ouvrir le débat concernant notre vision de l’éducation, celle que nous devons opposer à la droite et proposer à tous ceux dont nous souhaitons porter les aspirations.

I. Promouvoir l’égalité réelle au sein de l’École Républicaine

La Gauche peut se féliciter de la massification scolaire du fait qu’une part considérable d’une génération sort désormais du système scolaire avec son baccalauréat. Or, force est de constater que plus le niveau d’études augmente, plus la proportion d’élèves des couches sociales les moins favorisées diminue. Les inégalités, présentes dès l’école maternelle, s’accentuent au fur et à mesure que le niveau d’études augmente, du fait d’une moins bonne réussite des enfants issus de milieux défavorisés ou, tout simplement, de choix d’orientation influencés par le milieu social.

Alors que les enfants d’ouvriers, d’inactifs et d’employés représentent la majorité des élèves de sixième (56 % pour les deux catégories cumulées), ils ne constituent qu’une faible part (16 %) des élèves de classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE). A l’inverse, les enfants, dont les parents sont cadres ou exercent une profession libérale, ne représentent que 16 % des élèves de sixième, tandis qu’ils constituent plus de la moitié (55 %) des élèves de classes préparatoires.

Face à une telle situation, nous estimons que notre nouvel horizon de transformation sociale réside essentiellement dans une lutte massive contre les mécanismes de « reproduction sociale » dont notre système scolaire, bien loin d’être l’instrument nécessaire à la réduction des inégalités, s’avère être en fait un vecteur qui les perpétue voire les amplifie.

Dans ces conditions, promouvoir l’égalité réelle des chances consiste à vouloir dépasser l’égalité formelle des droits, c’est-à-dire accepté de ne plus être dans l’illusion selon laquelle l’école est intrinsèquement le lieu républicain de l’égalité de tous.

Souhaitant combattre les inégalités à la racine, nous devons donc agir en premier lieu là où se détermine les trajectoires professionnelles et où se façonne les destins de chaque personne. Les inégalités de destin se trouvant être conditionnées en grande partie par les inégalités sociales et économiques du territoire où l’on vit (l’exemple des banlieues étant le plus significatif), défendre l’égalité réelle consistera dans un premier temps :

·     à donner à chacun un capital public qui compense et équilibre un capital de départ parfois fragilisé. Le principe consiste à « donner plus à ceux qui ont moins » et à concentrer les moyens pédagogiques sur ceux qui en ont le plus besoin.

 

·     à tendre vers une mixité sociale réelle en aidant à la mobilité géographique des élèves (avec l’ouverture d’internats et l’aide aux transports ; en encourageant les grandes écoles à recruter dans les milieux les plus modestes, en envisageant une refonte de la carte scolaire, etc.)

 

·     à définir une nouvelle politique des zones d’éducation prioritaire (renforcer massivement les moyens financiers, adapter l’enseignement aux besoins pédagogiques des élèves en réduisant les effectifs par classes et en incitant les enseignants les plus expérimentés à y exercer, etc.)

A partir de cette méthode, nous devons cibler les tranches d’âge cruciales (celles qui marquent la construction identitaire des enfants) tout en formulant une vision globale et transversale de l’École Républicaine, allant du plus jeune âge à l’adolescence, alliant enseignements fondamentaux et perspectives d’orientation, articulant domaines scolaires et périscolaires.

Un exemple : promouvoir l’égalité réelle dès la petite enfance.

Prendre en compte les inégalités à la source suppose que l’action publique commence dès la petite enfance en passant notamment par la création d’un service public de la petite enfance de (0 à 3 ans) qui couvrirait la généralisation des crèches, les gardes d’enfants, le suivi médical et psychologique.

2,4 millions d’enfants seraient concernés par la mise en place du service public de la petite enfance (en sachant qu’aujourd’hui, 10% d’entre eux bénéficient d’une place en crèche alors que plus de 50% sont gardés à domicile par leur mère ; 1% du PIB est investi dans la petite enfance ce qui est loin d’être suffisant).

Objectifs principaux:

·     offrir les mêmes conditions de socialisation et donc les mêmes chances de développement à tous les enfants quel que soit leur milieu d’origine (il faudra pour cela garantir un service public de même qualité quelque soit le territoire où l’on vit en clarifiant les rôles et des financements des collectivités, de la CAF et de l’État afin de gommer les disparités géographiques)

 

·     porter à 3 ans le début de la scolarité obligatoire afin d’acter le rôle fondamental de l’école maternelle pour lutter contre l’échec scolaire (notamment dans l’acquisition et la maîtrise du langage)

 

·     offrir un suivi pédagogique individuel et personnalisé (cela implique des classes à petits effectifs et aux moyens pédagogiques et humains renforcés, notamment dans les quartiers marqués par les inégalités sociales ou dans les milieux ruraux où les modes de garde collectifs sont encore rares)

 

·     envisager un cursus d’accueil laissant le choix au couple des modes de garde qui correspond le mieux à leur enfant et développer l’inter modalité de l’offre de garde, notamment pour les couples travaillant en horaires atypiques (cela permettrait, entre autres, de favoriser la reprise d’activité des femmes dès la fin du congé de maternité

 II. Promouvoir une société de l’éducation permanente


Confrontée aux défis de la mondialisation, l’Europe a fait le choix d’une économie de la connaissance. L’Éducation nationale, enseignement supérieur compris, doit désormais s’intégrer à un vaste réseau permettant l’émergence d’une éducation tout au long de la vie.

Dans ces conditions, l’égalité réelle doit se concrétiser par :

·     la volonté d’élever le niveau général de formation et de qualification du plus grand nombre

 

·     la volonté d’étendre les libertés de chacun en permettant aux personnes de s’émanciper dans un cadre collectif et en leur fournissant les moyens de choisir leur façon de vivre, leurs liens et leurs pratiques culturelles.

Cela implique par ailleurs que la clé de la réussite scolaire englobe l’orientation et l’insertion professionnelle. 

A - Assurer la réussite scolaire de tous en permettant à chacun de mieux s’orienter.

Constat : le problème majeur de l’éducation reste celui de l’échec scolaire

Au terme de la scolarité obligatoire, notre modèle met à l’écart  près de 150000 jeunes chaque année sans leur permettre d’accéder au baccalauréat ou à une qualification professionnelle.

D’autre part, seuls 45% des bacheliers inscrits en licence LMD parviennent en troisième année sans redoubler et plus de 20% des étudiants font le choix d’interrompre leur cursus universitaire au cour des deux premières années.

Face à une telle situation, la réduction de l’échec scolaire suppose de repenser globalement le problème de l’orientation (à travers les interfaces collège-lycée et lycée-supérieur), le préalable étant un accroissement indispensable des moyens humains et financiers de manière à améliorer qualitativement l’encadrement et l’accompagnement des collégiens, des lycéens et des étudiants.

Dans cette perspective, nos pistes de réflexions sont les suivantes :

·     repenser le lien entre la classe de troisième et de seconde

Elles pourraient être conçues comme deux étapes d’un même cycle d’orientation prenant appui sur un tronc commun destiné à donner à tous les élèves les fondements d’une culture commune de base ; sur des itinéraires de découverte permettant d’explorer les différentes voies de formation et  s’inspirant des TPE ; sur un emploi du temps intégrant un volume horaire destiné à l’orientation et à l’élaboration d’un dossier personnel assurant une traçabilité de l’itinéraire de l’élève. L’orientation reposerait en fin de seconde sur le choix des familles et de l’élève après avis du conseil de classe.

·     repenser le lien entre la classe de terminale et la première année de licence

Cela nécessite une évolution du contenu et des modalités des enseignements, notamment la mise en œuvre de travaux s’inspirant des TPE pour préparer les élèves au type de production du supérieur. La première année du cycle LMD doit faire l’objet d’une attention spécifique afin qu’une orientation soit rendue possible tant par le contenu des enseignements pluridisciplinaires délivrés favorisant l’acquisition progressive d’une spécialité que dans ses modalités (démarches expérimentales, tutorat d’accueil, encadrement et dossier personnel).  

B - Garantir la poursuite des études dans le supérieur en assurant l’autonomie de chacun et l’insertion professionnelle de tous

Constat : les 2 problèmes majeurs des études dans le supérieur restent les conditions dans lesquelles elles sont faites et l’insertion professionnelle

Avec la massification de l’enseignement supérieur, la précarité est devenue une réalité aussi bien durant les études (un nombre toujours plus grand d’étudiants est contraint de travailler pour financer ses études) qu’après le diplôme (le CPE proposé par la droite en 2006 fut l’exemple d’une mauvaise réponse apportée à une vraie préoccupation des étudiants : l’insertion professionnelle).

Face à une telle situation, nos pistes de réflexions sont les suivantes :

·     à court terme, repenser le système des bourses

 

Défendre l’idée d’une augmentation, d’une pondération en fonction du territoire et d’un rétablissement d’une véritable justice sociale dans le financement) et le compléter par d’autres dispositifs (développer par exemple les prêts d’État à taux zéro pour les étudiants,  remboursables une fois l’étudiant diplômé et seulement s’il occupe un emploi stable et  rémunéré) 

·     à  long terme, écarter les propositions du type « allocation d’autonomie » pour les étudiants

 

Cette idée introduit un égalitarisme douteux du fait d’être attribuée universellement ; elle instaure un statut juridique pour les jeunes en fonction de l’âge et non d’un besoin social et implique que les jeunes ont les mêmes projets. Il conviendrait de déplacer le problème à un niveau plus global intégrant la question de la formation tout au long de la vie. Le débat porterait alors sur l’idée d’une allocation/crédit de formation, utilisable dès 16 ans, couvrant l’équivalent de 8 années de formation utilisable en plusieurs séquences et permettant à chacun de construire son propre parcours de formation

·     soutenir les formations de qualité adaptées au monde du travail

 

En créant un contingent de bourses (à l’échelle régionale par exemple) de manière à soutenir la formation (bourses de stages en PME/PMI) et l’intégration des doctorants (bourses doctorales type thèse SIFRE) ; créer des conventions techniciens supérieurs autour de projets innovants, de titulaires de BTS ou DUT et de centres de compétence. Favoriser les contrats de transfert de technologie qui associent les compétences d’un diplômé Bac+5 à un établissement d’enseignement supérieur, un organisme public de recherche ou un centre technique et une PME/PMI disposée à financer le projet pour partie.  

·     Moduler le taux d’impôt sur les sociétés afin d’inciter les entreprises à embaucher des jeunes

 

Il s’agit de favoriser les entreprises qui s’engageront dans cette politique d’insertion massive des jeunes par l’alternance, en allégeant leur fiscalité à hauteur du nombre de contrats conclus. Celles qui ne jouent pas le jeu seraient à l’inverse pénalisées. Afin d’être efficace, la modulation devrait être significative (à hauteur de 50%) et afin de ne pas être pénalisante, elle porterait sur les bénéfices plutôt que sur les cotisations salariales. Cette proposition permet de réintégrer dans la logique de rentabilité des entreprises le financement de l’insertion professionnelle des jeunes, de leur formation-qualification et la reconnaissance des acquis de leur expérience. 
 

C - Faire vivre l’éducation sous toute ses formes 

Constat : l’éducation populaire n’est plus soutenue. En témoignent, depuis des années, l’absence manifeste des politiques publiques de l’État, son désengagement constant, le renvoi à l’initiative des bénévoles et au bon vouloir des collectivités locales.  

Face à une telle situation, nous devons défendre l’idée selon laquelle l’éducation populaire vise à développer tout au long de la vie l’autonomie des individus et favorise un exercice complet et responsable de la citoyenneté. Elle est aussi une arme pour lutter contre les inégalités. A ce titre, elle doit devenir un véritable service public, partenaire privilégier et complémentaire de l’Éducation Nationale. 

Dans cette perspective, nos pistes de réflexion sont les suivantes :  

·     une loi d’orientation pour l’éducation populaire qui fixe les objectifs et les moyens d’une politique de l’État, détermine la responsabilité des collectivités publiques et du secteur associatif.

 

·     un renforcement de la professionnalisation des intervenants, bénévoles ou salariés. Les compétences acquises dans l’encadrement, bénévole ou professionnel, des pratiques d’éducation populaire et sportives doivent être valorisées et validées.


Le MJS se doit d'être offensif et propositionnel en matière d'éducation car l'éducation permet de promouvoir le socialisme de l'émancipation et ouvre le chemin de l'avenir. 

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1 novembre 2008 6 01 /11 /novembre /2008 15:40

De quel réel cette crise financière internationale est-elle le spectacle ?

Celui d’un monde profondément instable affrontant la crise globale et multiple (financière, boursière, monétaire, économique, énergétique, alimentaire, écologique et immobilière) du capitalisme dans sa version moderne. Celui d’une politique internationale hésitante et paraissant vouée à l’impuissance en l’absence d’outils et de règles qui lui permettraient pourtant d’envisager une régulation des échanges financiers et commerciaux à une autre échelle que celle des États affaiblis.

Ce paysage qui nous fait redouter le pire renouvelle considérablement la toile de fond dans laquelle nous avions bâti les mots d’ordre de nos batailles et les propositions que nous portions. Face à une telle situation, nous pensons que l’objectif des socialistes européens est double :

 -  Établir un diagnostic détaillé de la crise financière

 -  Construire un nouveau modèle de société et définir une nouvelle méthode pour y parvenir

Une telle crise nous inscrit collectivement dans un contexte historique porteur pour nos idées, offrant l’opportunité de réhabiliter les principes qui guident notre conception de l’action politique dans son rapport régulateur à l’économie. Car lorsqu’il s’agit de mieux redistribuer les richesses produites ainsi que de maîtriser, de réguler et d’orienter autrement la mondialisation, les socialistes européens doivent assumer leur héritage sans le sous-estimer. Pour cela, ils doivent réfléchir à une autre échelle, celle de l’Europe et du monde. Mais surtout, ils doivent réaffirmer ce qu’ils veulent et le redéfinir sur le fond. Sachons être à la hauteur !

Nous qui représentons la génération européenne, nous voulons contribuer à la réflexion des jeunes socialistes français sur le plan international, afin que notre projet marque la volonté d’armer les européens pour qu’ils soient plus forts et maîtrisent enfin la mondialisation.

I. Quelques éléments pour établir un diagnostic sur la crise financière internationale


Si l’opinion publique internationale semble s’étonner de l’ampleur d’un tel événement, il était pourtant prévisible. Car, de toute évidence, cette crise financière n’est en rien le fruit du hasard. La complexité d’un tel événement, parce qu’elle rend difficile pour le sens commun son appréhension, appelle selon nous un effort d’analyse et de pédagogie politiques.

Les socialistes européens doivent commencer par formuler un diagnostic critique qui pose et définisse les vrais problèmes et le faire partager afin de permettre d’envisager des solutions. Notre contribution au débat vise à fournir quelques éléments utilisables comme autant de « clés » nécessaires à l’élaboration d’une grille de lecture collective d’un tel événement.

La perversion du capitalisme est à l’origine de la crise financière

Sans remonter aux nombreuses causes profondes de cette crise financière internationale et à la forte variation (baisse puis hausse) du taux directeur de la FED entre 2001 et 2006, nous pouvons attribuer les effets immédiats de cette crise au secteur banquier des prêts hypothécaires américains, consistant à prêter massivement à toute une population aux revenus moyens ou faibles sans se soucier des possibilités de remboursement. Les défauts de paiement se sont logiquement multipliés aux États-Unis provoquant ainsi les premières faillites de banques et d’établissements de crédits spécialisés.

Ce premier événement qui fait naître la crise financière trouve clairement son origine dans l’amoralité qui anime une partie de la profession bancaire et l’absence totale de régulation de ce secteur. D’une part, l’appât du gain pour les prêteurs n’étant plus fondé sur le paiement des loyers mais sur l’inflation immobilière, 1.300.000 Américains furent ainsi expropriés et la rapacité bancaire ne s’embarrassa d’aucun scrupule à l’égard de ses victimes. D’autre part, les détenteurs de ces créances douteuses, plutôt que de provisionner et de soumettre le tout aux régulateurs nationaux ou aux agences de notation, ont préféré mélanger ces titres avec d’autres, moins incertains, pour revendre le tout dans l’opacité totale sous couverts de filiales cachées et paradis fiscaux. Et c’est ainsi que toutes les grandes banques de la planète ont vu leurs bilans infestés de créances incertaines dont le montant est imprévisible : on parle de centaines de milliards de dollars.

Les banques se sont mises à se méfier les unes des autres et donc à ne plus se prêter, instrument de l’aggravation de la crise financière et de sa transmission à l’économie réelle. Les effets d’une telle transmission sont d’autant plus redoutables qu’au même moment la croissance européenne et la croissance française connaissaient un ralentissement fragilisant leur économie, courant le risque d’être frappées plus fortement et de s’acheminer progressivement, sans même y être préparées, vers une récession aux proportions incalculables. Une crise financière qui vient s’ajouter à une crise économique.

De 1945 à 1975, le capitalisme d’après guerre, sérieusement régulé, connaissait une croissance continue à un rythme rapide, sans crise financière et préservant le plein emploi dans les pays développés. Les clés d’une telle réussite résidaient notamment dans l’articulation d’une forte protection sociale avec des politiques économiques d’inspiration keynésienne et surtout des politiques de hauts salaires assurant consommation et croissance. Tout a changé dans les années 90. La croissance s’est ralentie de plus de moitié ; les crises financières régionales ou mondiales se sont multipliées et le quart des populations se sont retrouvées en situation de précarité.

La principale cause de ce drame planétaire est le réveil de l’actionnariat. Celui-ci, insuffisamment bénéficiaire à son goût des fruits des trente glorieuses, s’est réveillé et puissamment organisé en fonds de pension, d’investissements, d’arbitrage ou hedge funds. Il a exigé un retour sur investissement de plus en plus élevé et partout comprimé les revenus du travail pour assurer de meilleurs bénéfices. En 30 ans, la part des revenus directs et indirects du travail a perdu près de 10% dans le partage du PIB des pays développés au bénéfice du profit et non de l’impôt.

La stagnation des salaires réels, l’externalisation des tâches vers des PME, la précarisation de l’emploi et bien sûr la multiplication des OPA sont les diverses formes de diffusion de ces politiques.

II. Une méthode de régulation pour un nouveau modèle de société

Réformisme radical

Pour retrouver des marges de manœuvres, combattre les déséquilibres financiers, les désordres économiques, écologiques et les injustices sociales engendrées par le capitalisme mondialisé, les socialistes européens doivent selon nous se doter d’une nouvelle méthode : le réformisme radical.

Audace et crédibilité ! Nous devons marquer, en partant du réel, le retour du volontarisme politique, car le réformisme n’est pas condamné à un accompagnement du libéralisme économique et la mondialisation ne marque en rien la fin de notre action politique. Elle marque au contraire une nouvelle étape du socialisme.

De nombreux axes prioritaires sont à remettre au premier plan, sans pour autant prôner le retour au tout : politiques de redistribution, soutien à l’innovation et la compétitivité et investissement dans la recherche et l’enseignement supérieur. Il est surtout urgent de donner une définition sociale à la notion de progrès : investir dans la qualité de l’emploi, agir pour une meilleure répartition des revenus et des profits entre le capital et le travail, prévenir les inégalités dès la petite enfance et permettre une sécurité sociale et professionnelle toute au long de la vie axée sur la formation. Afin de remettre la finalité humaine au cœur de la décision et la finance à sa place d’instrument !

Ce réformisme radical doit dessiner l’horizon d’une transformation durable de la société afin de la rendre plus juste. En cela, il nous invite à concevoir la maitrise du pouvoir financier (régulation et orientation) comme devant être la cible de notre action. Entre acceptation et négation de la société existante, la question se pose en termes de pouvoirs : c’est en changeant la nature de ces derniers qu’on change la nature du système. Redonner un avenir à l’Europe

Lorsqu’elle sait ce qu’elle veut, l’Union européenne est encore à même d’infléchir le cours du monde. Alors que pris individuellement, les États qui la composent sont désormais hors d’état de le faire (la réponse à la crise financière est à ce titre un échec en termes de coordination). L’Union européenne est de ce point de vue une construction sans équivalent dans le monde. Si jusqu’à une période récente, l’essentiel des efforts de l’Europe s’est concentré sur la mise en place de l’Union économique et monétaire, il nous faut maintenant élargir la perspective de sa construction sous peine de la réduire à un marché et de la diluer dans la mondialisation. Car l’Europe, c’est bien plus qu’un marché. Elle a su inventé une méthode pour construire des médiations entre la nation et le monde.

A ce titre, elle est porteuse d’un modèle de société différent, ouvert et fondée sur un idéal de justice sociale et de respect de la personne humaine. Nous voulons une Europe forte, qui assume pleinement sa responsabilité dans la redéfinition de l’ordre mondial et qui se donne les moyens de porter un message de paix, de solidarité et de pluralisme. La séquence nous en donne les moyens si nous savons nous en saisir, d’autant plus que jamais l’Europe n’a été aussi utile et efficace que dans ses moments de crise. C’est ainsi qu’elle a toujours avancé ! Pour renforcer la construction européenne et lui redonner un avenir, nous proposons :

Une politique sociale et fiscale plus juste

L’Europe sociale, priorité de tous les socialistes, doit passer par une protection sociale forte en instaurant : un revenu minimum européen au pro rata du coût de la vie de chaque États-membres, la rédaction d’un code du travail européen, la création d’une sécurité sociale professionnelle, la création d’un fond européen de soutien aux salariés victimes des restructurations.

Une politique budgétaire plus ambitieuse

L’Europe sociale ne sera possible qu’avec une augmentation substantielle du budget européen. L’Union doit se doter de la possibilité d’emprunter et d’un impôt européen sur les sociétés. En l’absence d’un gouvernement économique, nous devons institutionnaliser l’Eurogroupe afin de créer un pilotage macro-économique de la zone euro : la réunion des ministres des finances de la zone euro doit avoir les pleines compétences juridiques pour arrêter la politique économique de la zone euro et y élire un président stable, qui sera le ministre des finances de l’Europe.

Une politique économique plus efficace

Nous proposons de réviser les statuts de la Banque centrale européenne (BCE). Du fait de son attention trop exclusive à la stabilité des prix, la politique monétaire de la BCE est un frein à la croissance. Certes, la prise en compte de l’objectif de croissance et d’emploi pourrait se faire à statuts inchangés, avec d’autres banquiers centraux. Mais ce serait un signe politique fort. Il ne s’agit pas de revenir sur l’indépendance de la banque centrale, systématique dans toutes les grandes démocraties. Ce qu’il faut, c’est tout simplement un alignement sur les statuts qui existent dans les autres pays occidentaux et qui ont fait la preuve de leur efficacité. Pour s’opposer à la spéculation par l’investissement, la Banque européenne d’investissement (BEI) doit faire du crédit d’investissements dans d’importants projets d’infrastructures ou en faveur des PMI/PME innovantes. Selon ses statuts, la BEI, dont les capitaux sont souscrits par les États, peut prêter à hauteur de 250 % ses capitaux propres qui atteignent actuellement, près de 165 milliards d’euros.

Bâtir une démocratie-monde

Du fait de la globalisation et de l’affaiblissement des Etats-nation, les enjeux politiques sont désormais mondiaux : le territoire de la régulation doit, à terme, être mondial. Or cette régulation mondiale est embryonnaire et trop hésitante. Nous devons donc contribuer à l’émergence d’un nouvel ordre mondial fondé sur le développement durable et solidaire ainsi que la maîtrise des échanges financiers et commerciaux. A cette fin, nous défendons :

Une réforme de la gouvernance mondiale à l’occasion d’une conférence financière internationale de type Bretton Woods II. Cette réforme doit nous permettre :

   De créer un pôle de régulation mondiale des marchés financiers dont l’objectif serait de prendre en charge la réforme des agences de notation, l’obligation d’une information détaillée pour les épargnants sur les risques encourus, l’instauration d’un régime de responsabilité pour les acteurs du secteur financier, modifier les normes comptables des entreprises, durcir les dispositifs prudentiels des banques, contrôler et les fonds spéculatifs, intensifier notre volonté de transparence.

   De repenser le partage des pouvoirs à l’échelle mondiale : formation de « ministères » mondiaux : un ministère des finances (le FMI), un ministère des affaires sociales (l’Organisation internationale du travail), un ministère de l’environnement (l’Organisation mondiale de l’environnement, à créer)...

   De développer des décisions et des accords juridiquement contraignants. C’est le cas à l’OMC : le GATT, le GATS sont des accords qui ont une force juridique contraignante, dont la violation est sanctionnée par le juge de l’OMC (l’Organe de règlement des différends). Ce n’est pas le cas avec l’OIT : les conventions qui y sont signées n’ont pas de force juridique contraignante.

   De démocratiser les institutions internationales par l’imposition du respect de certains critères. L’OMC doit par exemple imposer le respect des critères du protocole de Kyoto et de l’OIT aux pays qui en sont membres et renforcer l’égalité de moyens pour les États membres car certains ne peuvent pas se payer une représentation permanente

   La création d’un juge indépendant pour trancher les conflits de normes. Aujourd’hui, seule le juge interne de l’OMC assure cette fonction juridictionnelle. Mais il n’est pas sain que le juge commercial tranche des différends entre le commerce et d’autres normes, notamment sociales et environnementales. Il faut confier ce rôle d’arbitrage juridictionnel à un juge indépendant : la Cour de justice de La Haye par exemple.

   La création d’un Conseil de sécurité économique, écologique et social mondial. Il aurait vocation à remplacer le G8 pour donner les grandes impulsions politiques. Il serait composé sur une base représentative selon le format des circonscriptions régionales en usage au FMI. Cela permettrait une représentation de tous les pays.

Une amélioration du partage mondial des richesses qui passe par :

  Une réorientation des politiques commerciales des pays du Nord. Leurs subventions faussent la donne commerciale entre les agriculteurs du Sud et du Nord. Il s’agit de diminuer progressivement cette intervention publique et de la réaffecter vers la demande intérieure et les investissements publics dans la recherche et le développement.

  L’instauration d’un impôt sur les bénéfices de la mondialisation. Il prendrait la forme d’une taxe additionnelle à l’impôt sur les sociétés de chaque pays. En cas d’échec sur un tel accord, une telle mesure devrait être prise au moins au niveau européen.

  Une augmentation de l’aide publique au développement et une annulation de la dette des Pays du Sud (qui doit se faire sous conditions éthiques et démocratiques).

 

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