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5 février 2009 4 05 /02 /février /2009 21:29

L’annonce de la suppression du juge d’instruction est encore un mauvais coup porté à la justice par le pouvoir en place.  Rappelons que le juge d’instruction est un  juge, qui instruit à charge et à décharge, de façon totalement indépendante. On le distingue des procureurs (qui composent le Parquet), qui eux, sont placés sous l’autorité du Garde des Sceaux et qui décident de façon discrétionnaire d’engager des poursuites. Ils remplissent une fonction d’accusateur public. Le juge d’instruction lui, est saisi soit par le Parquet soit par la partie civile. Il a pour mission d’enquêter, et d’arriver à la manifestation de la vérité.


On nous dit que la suppression du juge d’instruction sera indolore : moins de 5% des dossiers seraient traités par eux. C’est occulter la vérité : en réalité, les juges d’instruction sont saisis de 100 % des crimes, c'est-à-dire des infractions les plus graves. Le pourcentage de 5% ne concerne que les délits : mais cela signifie qu’il est saisi des plus délicats de ces délits . Le juge d’instruction est donc un élément clé de notre système procédural, spécialisé dans les affaires les plus complexes et essentiel à la qualité de la justice rendue.


Dans le projet formulé par N. Sarkozy, le juge d’instruction sera supprimé et l’enquête confiée au Parquet. Il est vrai que le juge d’instruction n’est pas en lui-même la garantie d’une bonne justice, et que certaines affaires ont mis en lumière le manque de moyen, voire la nécessité de lui adjoindre un pair pour un regard pluraliste sur les dossiers. Ainsi, en Italie, pour lutter contre la corruption dans les milieux politiques, les dossiers ont été confiés à un parquet collégial totalement indépendant, les actes attentatoires à la liberté des individus restant soumis à l’autorisation d’un juge. Or, le projet présidentiel ne prévoit pas de confier une telle indépendance aux procureurs. Supprimer le juge d’instruction sans accorder une telle garantie de séparation des pouvoirs est une véritable aberration : qui ordonnera dorénavant de lancer une enquête contre les plus puissants, les proches du gouvernement ? La fin du juge d’instruction, c’est la fin d’un organe d’enquête indépendant, assurant l’égalité de tous devant la loi et permettant un réel équilibre entre les pouvoirs.


On le voit, les hommes politiques peu scrupuleux peuvent se frotter les mains de cette annonce : Le juge était devenu l'homme à abattre depuis les derniers scandales politico-financiers. Mais les avocats également. Dorénavant, eux seuls assureront la défense. On nous dit que cette défense sera renforcée. Soit, mais l’avocat qui devra assurer la tâche qu’effectuaient auparavant le juge d’instruction ne le fera pas gratuitement, et ses honoraires augmenteront, au détriment des plus pauvres.

Cette réforme nous semble donc doublement inacceptable: le juge d’instruction doit être sauvé, même si une réforme s'avérait nécessaire. Pourtant, si le Président veut réformer la Justice, les vraies priorités ne manquent pas : recruter de nouveaux magistrats, arrêter de privilégier le chiffre au détriment de la qualité et surtout s’occuper de l’état catastrophique de nos prisons. 

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